Evelyne Leroy, peintre aquarelliste et responsable d'atelier, nous fait partager sa passion pour les gens ! Et sous nos yeux, peint plusieurs scènes. Magique !
Bonjour, vous êtes en compagnie de Fred de rart.fr et d’Evelyne Leroy. Pendant qu’Evelyne se prépare, on démarre la vidéo. Elle a eu la gentillesse de revenir avec nous après la dernière séance réalisée ensemble à l’extérieur. On a eu pas mal d’interrogations depuis et aujourd’hui, elle va nous parler du croquis aquarellé.
Le croquis à l’aquarelle en quelques lignes
Alors on a plutôt ciblé les personnages pour expliquer comment on peut réaliser un croquis aquarellé rapidement en extérieur. On a un carnet de voyage puisque la spécificité d’Evelyne et son plus grand bonheur c’est de faire des croquis à l’aquarelle dehors. Quand on dessine à l’extérieur, il est intéressant d’intégrer ce qu’on voit dans le paysage et surtout les personnages qui vont donner vie à l’œuvre. Ce qu’on a envie de montrer aujourd’hui dans cette vidéo c’est qu’il ne faut pas avoir peur, faites sauter les verrous, oubliez les inquiétudes que vous avez de vouloir croquer quelqu’un avec un trait un peu décisif. L’aquarelle n’est pas comme ça. On est là pour vous aider à vous lâcher, à prendre confiance en vous, à franchir le pas. On va voir le matériel dont on a besoin puis on va réaliser quelques gros plans.
Le matériel nécessaire pour croquer à l’aquarelle
Pour faire simple, on imagine qu’on est à l’extérieur et qu’on veut simplement croquer rapidement. Concernant le matériel basique, on a besoin :
- d’une palette ;
- d’un pot à eau flexible, très pratique en extérieur ;
- d’un chiffon ;
- de mouchoirs en papier ;
- de pinceaux ;
- d’un papier ou un bloc à aquarelle ;
- d’un crayon gris ;
- d’une gomme mie de pain pour ne pas abimer la feuille à aquarelle.
On a fait un petit tour dans le matériel utilisé par Evelyne Leroy. Elle a composé elle-même sa boite de godets pour avoir les couleurs avec lesquelles elle a l’habitude de travailler pour être plus à l’aise. Les teintes se trouvant sur sa palette sont très variées : jaune citron, terre de sienne naturelle, jaune de cadmium, jaune auréoline, terre de sienne brûlée, ombre brûlée, green gold, bleu de prusse, bleu outremer, bleu cobalt, gris de payne, bleu indigo, orange, rouge vermillon, rouge vif, rouge de cadmium et garance brune. Elle travaille au feeling et n’hésite pas à faire beaucoup de mélange.
Elle utilise des pinceaux en poils de martre parce qu’ils sont assez souples et nerveux par rapport au petit gris. Ce dernier est parfait pour travailler le fond autour des personnages et dessiner le paysage car il a une grande capacité à retenir l’eau. Le pinceau martre, quant à lui, est la qualité au-dessus et il est très peu absorbant. Il permet d’être incisif, un trait de caractère nécessaire pour réaliser des personnages à l’aquarelle.
Au lieu d’utiliser un simple papier à aquarelle, Evelyne préfère travailler sur un carnet Arches de 300 grammes. Lorsqu’on travaille en extérieur, il est plus pratique d’avoir un bloc en spirale au lieu d’un carnet collé sur le côté. C’est plus facile de tourner les pages. Il est aussi tout à fait possible de faire des exercices sur un bloc Arches traditionnel, il n’y a aucun souci.
Place à la démonstration
On peut utiliser un carnet petit format pour le croquis à l’aquarelle mais pour la vidéo, c’est plus pratique de travailler sur une grande feuille. Concernant le modèle, ce seront les gens qui passent dans la rue puisqu’on travaille à l’extérieur. L’idée c’est d’apprendre à observer les personnages et de garder en mémoire ceux qui nous tombent sous les yeux : une personne qui a levé le bras, une autre qui tenait un enfant, etc. Pour arriver à garder en mémoire leur attitude, il ne faut pas aquareller mais dessiner tous les jours dans un carnet à moleskine qu’on garde à portée de main. On peut également croquer les gens en prenant place à la terrasse d’un café, dans un train ou dans un métro. On peut prendre une photo et travailler avec. C’est notre cas dans cette démonstration. On peut utiliser également une page de magazine pour s’habituer à croquer.
Quand on est à l’extérieur, il faut se dire qu’est ce qu’on va faire et on regarde notre palette. Ensuite on croque rapidement les personnages comme si on y était. Puisque le thème du livre d’Evelyne c’est la Baie de Somme, on peut imaginer que cette dame peut être au bord de la plage en train de marcher. Et ces deux dames sont des mamies qu’on a vraiment rencontrées à Saint-Valéry. On a croqué là pour vous montrer deux techniques différentes. Ce sont des grands traits pour marquer les lignes directrices des personnages c'est-à-dire la tête, les épaules, les membres supérieurs, la taille qui est un peu marquée, le bassin, les jambes, les cuisses qui sont toujours un peu longues, les mollets et une suggestion des pieds. Les mains c’est pareil, on marque le pouce et la forme mais ce n’est pas la peine en croquis aquarellé de compliquer les choses et de passer dix minutes à les dessiner.
De l’autre côté, c’est la même chose avec les deux mamies. Elles sont de dos contrairement à la dame qu’on voit de face. On aime beaucoup dessiner les personnages de dos puisqu’on a l’impression de partir avec eux. Ils s’intègrent plus facilement dans le paysage donc comme tout à l’heure, on dessine la tête, les épaules, les bras, le bassin, les jambes, les pieds et les chaussures. On suggère plutôt les mains et on croque quelques traits en guise de cheveux. Voilà, c’est dessiné à grand trait et on a fait quelques personnages dans le lointain pour marquer comment on va faire. On peut suggérer des gens si on est dans la rue où il y a plein de monde. On va faire rapidement la dame de gauche.
On va commencer par une couleur claire, toujours à l’aquarelle. On rajoute un peu d’eau et on applique un peu de terre de sienne brûlée, puis un soupçon de garance brune pour marquer les ombres sous les cheveux. On revient après s’il le faut. On va colorer la robe de la dame en rouge puisque c’est sa couleur sur le modèle. On pose tout d’abord la peinture sur les parties qui seront assombries puis on l’étend avec de l’eau. Vous voyez, on peut peindre quelqu’un rapidement. On va tout de suite marquer les ombres du vêtement en reprenant la même couleur mais un peu plus marquée. On reviendra mettre quelques détails après mais là, on imagine que la personne est devant nous en train de se promener et donc, on n’a pas trop le temps. Une fois qu’on a saisi l’essentiel, la dame peut s’en aller. On prend du rose permanent mélangé avec de la terre de sienne naturelle pour obtenir la couleur de la chair. Même si les teintes se mélangent, ce n’est pas grave. On habille la petite culotte du maillot de bain en rouge et on éclaircit un peu les endroits qui en ont besoin.
Pour faire le fond autour d’elle, on va mettre de l’eau en essayant de passer au plus près de sa silhouette. Il faut préparer le papier si on veut le réaliser en fondu afin de pouvoir suggérer que la dame est au bord de la plage. On peut la laisser comme ça et s’arrêter si on veut car tout est déjà là et y revenir plus tard pour confiner les détails. Pour la démo, on suggère autour de la dame un peu de bleu. Les fusions qui se font sont magiques. Quand on réalise le croquis aquarellé d’un personnage, il ne faut pas vouloir trop en dire sinon le sujet devient inintéressant.
Lorsque le dessin est un petit peu sec, on peut y revenir avec moins d’eau pour terminer certaines zones d’ombres. C’est par exemple le cas de la cuisse arrière qui est beaucoup plus sombre que l’autre. Lorsqu’on travaille à l’extérieur, l’aquarelle sèche plus vite car le soleil est présent même dans le Nord pendant les beaux jours. On va aussi foncer un peu les cheveux. Comme c’est presque sec, faut pas avoir peur. La fusion va se faire et le personnage n’aura pas l’air d’être un puzzle ou une poupée habillée.
Pour dessiner un personnage en aquarelle, il faut être rapide et aller à l’essentiel. Il faut saisir le moment et après, il ne faut pas oublier de mettre l’ombre de la personne au sol. C’est très important parce que c’est ça qui va la poser. On peut le réaliser avec un gris. On va laisser sécher le premier modèle et passer aux mamies.
On reprend le modèle puis après on l’oublie. Toute ressemblance avec des personnages ayant existé est tout à fait volontaire puisque ces deux mamies, on les a vraiment rencontrées. Là, on va travailler un peu dans le sec parce qu’on est moins dans la représentation d’un personnage qu’on veut saisir. Elles ont à peu près la même couleur de cheveux donc on va éclaircir légèrement. Il ne faut pas hésiter à mélanger les couleurs car c’est du croquis aquarellé, on essaye d’aller rapidement à l’essentiel. L’important, ce n’est pas de colorer les vêtements de la dame mais de marquer les plis existants. Il faut repérer la place des ombres et l’origine de la lumière afin de créer un conflit. Vous verrez qu’en faisant ça, on va leur donner vie. Il ne faut pas non plus s’attacher à refaire tous les plis, ce n’est pas la peine. Elle a son manteau imperméable sur son bras. On imagine toujours qu’on est dans la rue et que ça va vite donc on va tout de suite poser les couleurs claires. La lumière venant de la droite est excellente. On le sait parce que leurs ombres se trouvent à gauche. Ce n’est pas compliqué et c’est amusant de croquer rapidement les gens qui passent en s’asseyant sur un banc. Il ne faut pas avoir peur de rater. On va colorer le pantalon rose mauve en sachant que la jambe gauche est complètement couverte. Avant de peindre, il faut toujours regarder d’où vient la lumière et observer comment elle joue sur les personnages car c’est ça qui va déterminer l’aquarelle. C’est important d’avoir la base des modèles. Par exemple, le mollet a toujours un ombre intérieur et un ombre extérieur afin de lui donner un effet arrondi. Par contre, ce n’est pas la peine de dessiner le petit arrondi du talon ni le visage car il faut aller tout de suite à l’essentiel. On peut revenir rehausser certaines zones par la suite pour donner encore plus de contraste.
On va maintenant aquareller l’autre mamie qui est en rose. Pareil, on va repérer la lumière chez elle avant de commencer. Il faut aimer les gens pour réussir à faire leur croquis, entrer quelque part en conversation avec eux, entretenir une relation avec eux et raconter leur histoire. Lorsque les personnages nous voient en train de croquer leur image, ils ne réagissent pas trop au début. Ils nous regardent du coin de l’œil en se disant qu’est ce qu’on fait et on les entend parler. Quand on dessine les gens assis sur un banc, on leur montre leur croquis aquarellé au bout d’un moment et ils sont enchantés. Il n’est pas rare qu’on leur donne leur dessin.
Il ne faut pas hésiter à mélanger les teintes pour obtenir du gris ou avoir un jeu de couleurs intéressant. On peut les laisser fuser entre elles. C’est par exemple ce qu’on a fait pour séparer les deux jambes en faisant de l’ombre. Pour les personnages dans le lointain, on va tout simplement leur donner une ombre grise bleutée. On ne les détermine pas trop, on les suggère simplement parce qu’ils ne sont pas les principaux sujets. Ce n’est pas intéressant d’avoir du noir à l’aquarelle, il est préférable d’opter pour du gris foncé qu’on fabrique soi-même. On en pose un petit peu pour rendre les personnages secondaires vivants et les aider à se tenir debout. On va finir l’aquarelle par les bras de la mamie, son talon et puis le manteau bleu qu’elle tient à la main comme celle de sa copine.
Il nous arrive de surligner les personnages avec de l’encre pour leur donner plus de graphisme. Si on n’a pas eu le temps de bien les finir, on peut à ce moment là leur donner un peu plus de vie avec un crayon ou une encre de chine. Il faut le faire après le séchage sinon ce sera une catastrophe. Dans notre démonstration, on va redonner un peu de volume à la petite dame. Souvent, les traits deviennent rouges parce qu’on est allé vite. Peu importe si on le refait après avec de l’encre. On verra que le personnage sera redessiné. Quand le temps nous manque et qu’on ne peut pas avancer plus vite, on suggère juste les grandes lignes afin d’obtenir plus de mouvement. Le modèle prend vie et ça permet de dire ce qu’on n’a pas eu le temps d’exprimer par exemple avec les ombres et la lumière. Il nous est arrivé de peindre des gens au carnaval et imaginez la vitesse où les personnages passent. Il est donc important de saisir l’essentiel et leur ombre.
Lorsqu’on travaille à l’extérieur, il faut prendre l’habitude de croquer rapidement et éviter de faire des dessins aboutis comme ces exemples. Voilà un croquis aquarellé qu’on a réalisé assis sur la plage. C’est un bon exercice car les gens ne bougent pas trop et on s’installe derrière. On attend de les croquer en allant à l’essentiel c'est-à-dire faire des grands traits et repasser surtout sur les zones d’ombres. Lors de notre démonstration, c’est similaire. On a travaillé exactement de la même façon mais on doit seulement revenir un peu sur les ombres en remettant quelques tâches de couleur dans le décor. On n’a dessiné que le plancher sur lequel les personnages évoluent.
Conseils sur le croquis à l’aquarelle
Pour dessiner un croquis à l’aquarelle, on ne se lasse pas de dire qu’il faut aller à l’essentiel. Il ne faut pas vouloir « chichiter » en persistant à dessiner les mains, les yeux et la bouche. Il est important de donner une silhouette et de placer le squelette c'est-à-dire la tête, les épaules, la colonne vertébrale, le bassin, les membres supérieurs et inférieurs. Si on veut dessiner un personnage à l’aquarelle, il faut trouver ses lignes de force et ensuite bien repérer la lumière et l’ombre. On doit poser les couleurs du côté sombre puis éclaircir le côté lumineux. C’est important de ne pas oublier l’ombre au sol du personnage. Plus on croque vite, plus on va à l’essentiel. Et plus on en fait, plus on va savoir alléger nos dessins.
Pour s’entrainer au croquis, il faut en faire et essayer de se lâcher vraiment. On peut même tenter d’en faire sans dessiner au préalable et dessiner directement le personnage à l’aquarelle. Le croquis qu’on fait au crayon est souvent déjà pensé pour l’aquarelle parce qu’il va nous servir de base pour la pose des couleurs. Le croquis est très important car si le personnage ne fait que passer par exemple, on peut juste faire son esquisse et poser les peintures après si on a enregistré les lumières et les couleurs. Il est également possible de croquer le personnage avec du crayon aquarellable puis après juste passer de l’eau pour estomper la couleur mais on verra ça une autre fois. Ce qu’on souhaite montrer aujourd’hui dans cette vidéo c’est le dessin et la rapidité avec laquelle on travaille le trait à l’aquarelle. Il faut avoir des personnages cibles et les autres qui sont éphémères car on ne peut pas dessiner toute une foule à l’aquarelle. Pour que le regard ne se perde pas, il faut toujours avoir un point d’intérêt. C’est très amusant de faire plusieurs croquis comme ça sur une feuille et de mettre un petit peu de textes puisque l’ensemble va former un super carnet de voyage. C’est vraiment facile et on y prend vite du plaisir. Il ne faut pas hésiter à jouer les contrastes.
Merci beaucoup à Evelyne Leroy d’avoir partagé sa passion avec nous. Vous trouverez ses coordonnées à la fin de la vidéo. Merci pour votre fidélité et vos encouragements. A bientôt.