Catherine Courdil donne une belle leçon à Fred par la mise au carreau de son dernier travail magnifique en cours. Elle nous reçoit dans son atelier.
On l’a déjà rencontré au Musée des beaux-arts de Lille. On se voit aujourd’hui dans un cadre magnifique car j’ai l’honneur d’être reçu dans son atelier. Dans cette vidéo, Catherine va nous parler de la technique qu’elle utilise pour réaliser une deuxième réplique du tableau Dénombrement de Bethléem pour le compte d’un client qui a vu la première version qu’elle a peinte au musée.
Pourquoi utiliser la mise au carreau pour peindre un tableau ?
Comme on a beaucoup de questions à poser, mieux vaut s’approcher avec la caméra. Déjà, le travail est magnifique au premier abord. Catherine fait une mise au carreau pour pouvoir refaire le dessin de façon précise et avoir des repères. La voir travailler avec cette technique est une véritable surprise car pour nous, on n’utilise la mise au carreau que quand on ne sait pas dessiner. Pour le tableau Dénombrement de Bethléem, c’est impossible de s’en passer car c’est un travail qui demande beaucoup de précisions.
La réalisation de la mise au carreau
Catherine est un peintre moderne car elle utilise son ordinateur et le logiciel photoshop pour réaliser les trames sur l’original. Ensuite, elle reproduit la mise au carreau sur le tableau. Les carreaux doivent être formatés à une taille standard. Le quadrillage s’effectue avec une règle. Lorsqu’on travaille sur un fond sombre, il est préférable d’utiliser un crayon craie très fine pour faire le damier.
Mais avant, parlons d’abord de la première étape qui est l’imprimatura, un mot d’origine italienne qui signifie « imprimeur » en français. On pose de la terre d’ombre sur une toile fine vierge en lin de couleur blanche. Cette matière va donner au fond la couleur d’un lin écru où les grains sont particulièrement visibles. On attend que ça sèche bien évidemment puis on utilise le crayon craie blanc pour réaliser la mise au carreau. On a choisi cet outil car il est facile à enlever et ça ne tâche ni altère la peinture. Après avoir essuyé le tableau, il ne reste pas grand-chose mais suffisamment pour que Catherine puisse se repérer. Lorsqu’on réalise une copie, il est très important d’avoir ce quadrillage qui permet d’avoir une reproduction extrêmement précise mais ça dépend de ce qu’on fait. On imagine très bien l’effet que cette vidéo va avoir sur tous les gens qui utilisent ce système.
Pour vous montrer que la mise au carreau est importante dans la peinture même chez les professionnels, la lentille du paysagiste est transparente et quadrille directement le paysage. Autrefois, les peintres, qui ne réalisaient forcément pas des copies, possèdaient une sorte de chevalet sur lequel ils posaient un cadre rempli de fils pour pouvoir mesurer les proportions. En fait, c’est un accélérateur qui permet de repérer les grandes directions quand on dessine.
Un petit tour sur l’atelier de Catherine
On profite de l’absence de Catherine, partie chercher son PC, pour faire un tour dans son atelier. Cet artiste peintre réalise sa toile devant son public au Musée des beaux-arts donc elle a l’habitude de s’exposer. L’atelier est très lumineux grâce au puits installé au plafond. D’après le propriétaire, il est très intéressant car la luminosité vient du Nord et descend d’en haut. Comme les rayons solaires se posent de façon indirecte sur la toile sans biais, la température est assez régulière.
La réalisation de la copie de la toile
Alors, Catherine a pris la photo du tableau original prise au Musée puis elle a fait un quadrillage au photoshop. Ca permet de voir tous les centimètres de l’image. Sur le PC, on peut agrandir ou au contraire rétrécir le modèle. Voyons par exemple les branches. Quand on voit tous les détails, on se dit que c’est impossible à réaliser. Avec la mise au carreau, le travail est encore très compliqué. Il est difficile de remettre les branches au bon endroit. Evidemment, on pourrait imaginer que ce soit possible de placer les branches n’importe où sauf que c’est un arbre avec identité et il ne va ressembler à aucun autre. Sur cette toile, le tronc est déjà là mais pas les branches.
Jusqu’à maintenant, Catherine a passé une vingtaine d’heures sur cette toile. La dernière fois, la copie du tableau Dénombrement de Bethléem lui a pris 450 heures. On espère qu’avec cette nouvelle approche, elle réduira de tiers ce laps de temps. Comme le rendez-vous est déjà pris, on aura probablement l’occasion de se voir de manière intermédiaire au cours de son travail afin de suivre l’évolution du tableau.
Comme l’échéance donnée par le client est court (en Avril et on est en Novembre), ça demande beaucoup d’heures de travail à l’artiste. Or, elle a également d’autres travaux en cours. On ne peut pas travailler tout le temps au Musée car le temps consacré au tableau y est plus court que celui dépensé dans l’atelier. Catherine va réaliser la moitié de son œuvre dans son atelier et l’autre moitié au Musée devant le tableau original. Il est d’ailleurs difficile de faire sortir ce dernier sans une autorisation. Il n’y aura pas d’aller-retour, tout s’effectue étape par étape.
Par rapport au tableau original, cette toile est 10% moins grande. On est ravi d’avoir discuté de la mise au carreau avec Catherine car elle a fait disparaitre nos idées préconçues. Dans nos têtes, on ne travaille au carreau qu’à l’école pour apprendre à dessiner si bien que voir des grands maîtres comme toi utiliser cette technique est tout simplement éblouissant. Mais attention, son usage dépend de ce qu’on fait. Même si on est dans l’improvisation ou dans la création, on peut réaliser ce qu’on appelle un dessin préparatoire sur un petit format puis l’agrandir avec la mise au carreau. Vous voyez, cette technique est possible même dans la création. Mais dans le cadre d’une copie, l’improvisation et le travail direct sur toile sont impossibles si on veut que tout ressemble parfaitement à ce que le client souhaite.
Avec la mise au carreau, on a la chance de pouvoir se lâcher, de se faire plaisir et de se dépasser, alors profitons-en. On passe également des étapes de ce type là pour accélérer le travail et se faire du bien.
Merci beaucoup à Catherine pour cette vidéo, c’était du bonheur. Comme ça peut être intéressant de voir comment la toile va évoluer, on prend déjà un rendez-vous de principe avec elle pour la suivre dans les autres étapes. On va donc se revoir très prochainement. Merci à vous tous pour la lecture, pour votre fidélité et vos encouragements et puis à bientôt.